Retour sur le séminaire organisé par la DGAC du 6 au 8 février 2018 : « Drones : comment encadrer une activité jeune et en forte croissance ? »

A l’image du ciel sud-coréen éclairé par 1200 drones lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Pyeongchang 2018, le drone occupe un peu plus chaque jour l’espace aérien en basse couche. En effet, leur utilisation, notamment pour des activités de travail aérien, connaît un développement rapide. « Comment encadrer une activité jeune et en forte croissance ? » : tel fut le thème du séminaire magnifiquement organisé sur trois jours par la DGAC et auquel le cabinet s’est rendu.

SELENE avocats en profite pour remercier tous les organisateurs pour la qualité de ces trois journées.

Riche d’enseignements, diverses thématiques ont été abordées : caractéristiques générales et évolution de la filière en France ; réglementation française en matière d’utilisation de l’espace aérien, de navigabilité, d’exploitation et de compétence des pilotes ; enjeux de la surveillance de l’activité ; enjeux de l’information du public sur les règles applicables (publication et communication) ; méthodes de lutte contre les utilisations malveillances (détection, identification, interception) ; retours d’expérience et témoignages des professionnels.

L’objet de cet article n’est pas de livrer un résumé de chacune des interventions, toutes de qualité, mais plutôt de mettre en exergue un sujet technique et complexe dont les enjeux et solutions ont été expliqués de manière claire et intelligible : U-Space. Relevant essentiellement du domaine de l’ingénierie, il est néanmoins essentiel pour le droit de comprendre le fonctionnement et les enjeux de ce projet.

Les statistiques délivrées par la DGAC montrent que l’espace aérien va de plus en plus être utilisé par les drones (1). Le développement de « U-Space » est donc un levier clef et nécessaire pour le développement de la filière (2). Toutefois, le développement est long, couteux et va soulever plusieurs problématiques, notamment en matière juridique.

  1. Statistiques témoignant du développement rapide de l’utilisation des drones pour des activités de travail aérien (DGAC)

Tableau 1 : Hors loisirs et expérimentation (2018)

  Exploitants Drones
Total 5232 9588
Scénario S1 5155 9286
Scénario S2 2509 4053
Scénario S3 4988 8156
Scénario S4 23 33

 

Tableau 2 : Répartition par activités particulières (2016)

Activités Exploitants Heures
Audiovisuel/Publicité/Communication/Spectacle 1567 49119
Agriculture/Environnement (relevés, épandages) 214 6402
Topographie/Cartographie/Volumétrie/géophysique 440 7787
Surveillance infrastructures linéaires 142 2384
Surveillance bâtiments/Ouvrages d’art/Infrastructures 387 6171
Immobilier 467 5310
Sûreté/Gestion de crise/Sécurité civile 61 690
Logistique/Transports 10 42
Formation au télé-pilotage 471 28856
Autres 428 8862
                                                                                                           Total 115623


En 2035 les statistiques prévoient qu’il y aura plus de 400.000 drones professionnels en Europe
. A titre de comparaison, aujourd’hui, l’aviation commerciale compte 80.000 appareils. Il apparait donc essentiel d’organiser le trafic aérien des drones : entre eux mais aussi avec les aéronefs habités (2).

  1. U-Space : un ensemble de services pour l’intégration des drones dans l’espace aérien

Qu’est-ce que « U-Space » ? U-space est un ensemble de services et de procédures spécifiques conçus pour permettre à un nombre important de drones d’avoir un accès sécurisé, efficace et sûr à l’espace aérien. Ces services s’appuient sur un haut niveau de digitalisation and d’automatisation des fonctions, qu’ils soient embarqués sur le drone lui-même ou qu’ils  fassent partie de l’environnement au sol.

Quatre phases de développement, auxquelles on associe des besoins technologiques, ont été identifiées par l’Europe :

  • Phase 1 (U-Space foundation services) : e-enregistrement, identification, geofencing

 

  • Phase 2 (U-Space initial services) : planification et approbation des vols, tracking, information dynamique sur l’espace aérien, interface avec ATC ;

 

  • Phase 3 (U-Space advanced services) : gestion de capacité des espaces, assistance à la déconfliction (entre drones mais aussi avec les aéronefs habités), fiabilité du lien C2, détection et évitement automatique ;

 

  • Phase 4 (U-Space full services) : interface intégrée avec l’aviation habitée, très haut niveau d’automatisation, connectivité et numérisation

 

L’avènement de « U-Space » suppose toutefois un réel investissement dans la recherche et le développement. En effet, les besoins d’intelligence artificielle, d’autonomie décisionnelle et, de collecte de données (big data) sont essentiels au bon fonctionnement des différents services proposés.

Quant au droit, il est évident que cette intégration des drones dans l’espace aérien va soulever des questions. Qui aura la priorité entre un drone et un aéronef traditionnel ? Quid de la responsabilité en cas de collision ? Quid des règles d’assurance ? Quid des nuisances pour les personnes au sol ? Quid du respect de la vie privée et de la protection des données personnelles ?  Quid de la normalisation, marquage CE pour garantir l’intégration de drones standardisés et certifiés ? Ce sont autant de questions auxquelles il faudra apporter des éléments de réponse.

POINTS CLÉS DE LA DECLARATION D’HELSINKI SUR LES DRONES DU 22 NOVEMBRE 2017 (appel à un renforcement de la coopération européenne)

Le 22 novembre 2017, dans le cadre de la stratégie européenne de l’aviation, la Déclaration d’Helsinki a été adoptée lors d’une conférence sur les drones organisée conjointement par la Commission et les autorités finlandaises. L’objectif est de garantir la mise en place d’opérations de drones commerciaux sûrs d’ici 2019 en Europe. Trois points clés peuvent être identifiés.

  1. Des exigences légales pour les drones et opérations de drones afin de garantir une utilisation sûre et efficace de l’espace aérien et pour la fourniture de services U-Space rentables.

En premier lieu, la Déclaration dresse le constat de la fragmentation croissante des frontières nationales européennes concernant le marché des drones. Aussi, met-elle un point d’honneur à rappeler ô combien il est important pour les autorités européennes et nationales de coopérer.

En second lieu, elle émet le souhait d’obtenir rapidement les bases d’un nouveau cadre législatif européen et exhorte l’AESA à effectuer tous les travaux de suivi nécessaires. Sans être exhaustive, la Déclaration souhaite, notamment, que cette réglementation :

  • repose sur des normes ouvertes ;
  • assure la qualité de l’information ;
  • reflète les rôles et responsabilités probables des acteurs impliqués dans les opérations de drones et U-Space ;
  • explique la façon dont les drones peuvent opérer dans l’espace aérien afin que les autorités aient les outils adéquats pour protéger les citoyens avec des niveaux élevés de sûreté, de sécurité, de confidentialité et de protection de l’environnement.

En troisième lieu, tout en soulignant la nécessité de garantir un accès équitable à tous les usagers de l’espace aérien, la Déclaration demande une certaine flexibilité dans la fourniture des services U-Space. Elle fait remarquer que pour que l’accès à l’espace aérien et aux services puissent être offert au meilleur rapport coût-bénéfice possible tout en permettant des services équitables et opportuns, il faudrait :

  • que la fourniture de ces services soient basée sur la demande du marché local ; et
  • que soit mis en place, dans la mesure du possible, une certaines concurrence entre les fournisseurs de U-Space.

Enfin, la Déclaration appelle à renforcer la coopération internationale en matière de réglementation avec l’OACI, JARUS et les pays tiers.

  1. Des investissements supplémentaires dans des démonstrateurs.

La Déclaration appelle à la mise en place, dans les meilleurs délais, d’un « European U-Space Demonstrator Network ». Cela permettrait d’avoir un réel partage des connaissances et, des retours basés sur l’expertise pratique des démonstrateurs.

Il est précisé que ces démonstrateurs devraient d’une part couvrir tous les aspects des opérations de drones et, d’autre part, être développés en étroite collaboration avec les autorités locales, y compris dans le cadre du Partenariat européen d’innovation – « Smart Cities & Communities projects ».

  1. Des investissements supplémentaires dans les projets de R & D à long terme.

Sur ce point, la Déclaration invite le secteur industriel à investir davantage dans des projets contribuant à l’intégration sûre des drones (comprendre « safe and secure »), notamment pour l’édition 2018 du plan directeur ATM en cours d’élaboration par le comité mixte SESAR entreprise. JM

Retour sur l’intervention de SELENE Avocats lors du séminaire de droit aérien organisé par l’IFURTA

Lors d’un séminaire de droit aérien organisé par l’IFURTA (Institut de Formation Universitaire et de  Recherche du Transport Aérien) entre le 11 et le 22 décembre dernier, SELENE Avocats est intervenu sur l’ensemble de la journée du 21 décembre afin de présenter le droit des drones. Il sera rappelé que le cabinet est membre du Conseil pour les Drones Civils, participe à la plupart des colloques nationaux et internationaux en matière de drones et, compte en son sein un pilote d’avion VFR/IFR.

L’objectif était de sensibiliser les étudiants et professionnels présents, tous intéressés par le secteur de l’aviation, tant d’un point de vue juridique qu’économique, à l’émergence d’une technologie prometteuse qui suscite toutefois de nombreuses critiques.

Trois thèmes ont été présentés et débattus :

  • La réglementation des drones

Le but était de livrer les points clés d’une réglementation qui évolue rapidement, de présenter les projets en cours et, ceux de demain, avant de réaliser un état des lieux de la jurisprudence nationale en la comparant, lorsque cela est possible, à la jurisprudence étrangère.

  • Le drone et la cybersécurité

Ce sujet est né du rapport de l’EASA 2017 (annual safety review) qui s’est saisie de la question de la place du drone dans la cybercriminalité, tant comme vecteur que comme victime d’infractions. L’absence de jurisprudence ciblée sur les drones a nécessité de soumettre aux étudiants et professionnels plusieurs raisonnements par analogie avec d’autres objets connectés.

  • Le drone, le droit au respect de la vie privée et, la protection des données personnelles

Le traitement de ce thème fut l’occasion de rappeler les grands principes en la matière puis de présenter leur application au drone.

Ce séminaire a suscité de nombreuses questions théoriques et pratiques (comme celle de l’identification des télépilotes) qui se poseront assurément dans le cadre de l’accompagnement des utilisateurs et/ou victimes de drones, qu’il s’agisse de les conseiller ou de les défendre devant une juridiction. Il a également permis d’échanger sur plusieurs points précis avec des professionnels africains dont le continent est promis à un très bel avenir en matière de drones civils professionnels compte tenu des particularités locales (distances considérables par exemple). Enfin, il a permis la rencontre d’étudiants passionnés et passionnants.

SELENE Avocats remercie chaleureusement l’IFURTA de nous avoir témoigné sa confiance et, réitéra avec grand plaisir cette expérience.

Les drones et les robots au service de la sécurité privée, une filière prometteuse mais juridiquement très encadrée

L’essor des drones et des robots permet désormais de les utiliser comme de véritables outils et non plus simplement comme des gadgets.

A ce titre, dotés de mobilité croissante et de capteurs de plus en plus performants, les drones et robots trouvent leur place dans la sécurité privée que ce soit pour les sites industriels, les chantiers de BTP de grande ampleur,  les sites agricoles ou encore les banques.

 

  • Des systèmes améliorant le métier de la sécurité

De nombreuses start-up investissent dans le marché de la sécurité privée en développant des produits sur mesure destinés à améliorer le métier de la sécurité.

Par exemple, l’entreprise EOS innovation a créé « e-vigilante », un robot autonome qui effectue des rondes automatisées et alerte la personne en charge de la surveillance du site dès lors qu’il détecte un incident. La personne en charge peut alors intervenir à distance par le biais de caméras, micros ou haut-parleurs.

De son côté, la société Azur Drones propose notamment un drone filaire pour des sites sans caméra d’une surface de 100 à 200 hectares. Le drone est en vol stationnaire et alimenté par un câble mais détient des capteurs capables de détecter des mouvements à 10 km pendant 10 heures.

Que ce soit les drones ou les robots, ils sont utilisés par les entreprises dans un objectif de réduction de couts mais également des risques relatifs aux aléas de la sécurité. Toutefois, alors que l’Homme a souvent peur d’être remplacé par le robot, les entreprises qui développent le marché de la sécurité affirment que ces robots n’ont pas vocation à remplacer le salarié mais à compléter efficacement son travail.

En effet, le salarié, plutôt que de faire des rondes sur le site, peut être installé à un poste de surveillance pour recueillir des informations plus précises en temps réels. Ceci lui permet de recourir à des solutions plus pertinentes et plus efficaces pour résoudre les incidents.

Cependant, les entreprises ne sont pas encore prêtes à utiliser ces systèmes tant du fait du défaut d’expérimentation et de formation dans ces domaines que de la règlementation stricte de l’utilisation de ces engins.

 

  • Les problématiques juridiques d’utilisation de ces technologies par les entreprises

De nombreuses entreprises aimeraient pouvoir se doter de drones pour garantir la sécurité de leurs sites.

Toutefois, la règlementation en matière d’utilisation des drones dits civils est assez stricte.

Le gouvernement français, tout comme l’Union européenne, légifèrent en la matière afin de de protéger les personnes face au terrorisme mais surtout de garantir le respect des libertés individuelles.

C’est ainsi que, par exemple, le vol de drone de nuit est interdit (sauf dérogation exceptionnelle). Or, l’utilisation de moyens de sécurité est plus spécifiquement nécessaire de nuit. De plus, si certains drones ont vocation à intervenir automatiquement en cas d’alerte d’un robot sur site et doivent décoller d’une base située à quelques kilomètres du site, le drone aura probablement à survoler des zones habitées, ce qui engendre des problématiques d’atteinte à la vie privée.

Par conséquent, tant que l’utilisation de drones demeurera aussi stricte, le marché de la sécurité privée, certes en croissance, ne pourra prospérer comme le souhaitent les industriels.  PB

Intervention de SELENE Avocats au colloque London UAV Show le 16 novembre 2017

SELENE AVOCATS, cabinet largement impliqué dans le secteur aéronautique, intervient aujourd’hui à Londres au colloque international « LONDON UAV SHOW » traitant de la plupart des problématiques présentes et futures relatives aux drones civils professionnels dans un cadre français, européen et international. Il s’agit notamment de réfléchir aux côtés des organismes étatiques (DGAC/EASA/FAA) et d’anticiper l’intégration des drones civils professionnels dans la navigation aérienne européenne.

Membre du Conseil pour les Drones Civils et d’UVS International, et comportant en son sein un pilote privé avion VFR/IFR, SELENE AVOCATS fera sa présentation aux côtés de son confrère Eric HANSCOM, avocat au barreau de Californie.

Pour davantage d’informations, voir https://www.excel.london/whats-on/the-commercial-uav-show-2017

« Mon espace drone », une interface qui tient ses premières promesses

Par un communiqué de presse du 30 août 2017[1], la ministre chargée des Transports Elisabeth Borne a annoncé l’ouverture du portail web « Mon Espace Drone ». Ce dernier a été développé par la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) afin de faciliter les démarches administratives des opérateurs professionnels de drones déclarés (ou souhaitant l’être) auprès de la DGAC. Pour le moment, les utilisateurs de drones de loisirs ne sont pas concernés.

Concernant l’inscription et l’utilisation de cette nouvelle interface, les exploitants de drones déjà déclarés auprès de la DGAC disposent automatiquement d’un compte et sont invités par mail à se connecter. Les autres devront faire la démarche de créer un compte personnel.

Concrètement, ce nouvel outil permet de dématérialiser et de centraliser des procédures administratives essentielles à l’utilisation professionnelle des drones. C’est un gain de temps et un outil d’information tant pour les utilisateurs que pour la DGAC. Ainsi, il est possible de:

  • Gérer ses données personnelles.
  • Réaliser ses déclarations d’activités (CERFA 15475) : un accusé de réception est instantanément reçu par mail après avoir rempli et validé sa déclaration sur la plateforme. Or jusqu’à présent il fallait envoyer un mail à son DSAC/IR régionale avec tous les documents nécessaires, ce qui pouvait prendre du temps.
  • Réaliser son bilan annuel d’activité (CERFA 15474). Il s’agit d’un document obligatoire qui renseigne sur les heures de vol ainsi que sur les incidents auxquels l’utilisateur professionnel de drone a pu être confronté (p.ex un crash). Ce nouveau portail permet donc de faire des piqûres de rappel à l’utilisateur.
  • De notifier au ministère des Armées les vols hors vue ou à plus de 50 m de hauteur dans les zones de manœuvres et d’entrainement militaires (ancien CERFA 15477).
  • De consulter l’historique des démarches réalisées et télécharger, à tout moment, l’accusé de réception et le Cerfa15475-02 correspondant.

→ ATTENTION: si l’utilisation de « Mon espace drone » est facultative pour les déclarations d’activité et les bilans annuels, en revanche, elle est obligatoire depuis le 1er octobre 2017 pour ce qui concerne les notifications de vol vers le Ministère des Armées.

Quant à l’avenir de cette interface, selon le Communiqué de presse, elle s’enrichira d’autres fonctionnalités dans les mois à venir à destination des professionnels mais aussi des utilisateurs des drones de loisirs. Ainsi, par exemple, selon la Fédération Française de Drone (FFD)[2], « Mon espace drone » va être étendu à tous les propriétaires de drones de plus de 800g et aux télépilotes de loisir dans le cadre de la prise en compte de la loi d’octobre 2016. Selon D. Jeant[3] (journaliste et télépilote professionnel de drone), dans une révision prévue au 1er semestre 2018, les déclarations de survols en scénario S3 (« populated area »)  vers les préfectures et les SNA devraient être intégrées à l’interface. Ce dernier fait également quelques propositions et indique notamment qu’il « serait judicieux que le portail soit optimisé pour smartphones et tablettes, en étant adaptif ». Cela permettrait de gérer plus facilement ses démarches, en déplacement. Le portail n’en est certes qu’à ses débuts mais il prouve la volonté du Gouvernement à soutenir le développement croissant de la filière drone, en apportant des réponses innovantes et adaptées aux besoins des professionnels. JM

 

[1] Communiqué de presse, 30 août 2017, en ligne: <https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/2017.08.30_cp_ouverture_portail_web_monespacedrone.pdf>.

[2]  <http://www.federation-francaise-drone.com/mon-espace-drone/>.

[3] Aerophoto, Nouvel espace drone pour les professionnels, en ligne: < http://aerophoto-drones.bzh/2017/08/30/nouvel-espace-drone-professionnels/>.

Laurent Archambault, Associé fondateur de SELENE Avocats évoque l’encadrement juridique des drones militaires dans Drones Actu

Indemnisation forfaitaire en cas de vol retardé ou annulé : les passagers ont désormais 5 ans pour agir

Le Règlement (CE) n°261/2004 du 11 février 2004 établit des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol. Les passagers concernés peuvent ainsi bénéficier d’une indemnisation pécuniaire forfaitaire à moins que le transporteur aérien ne prouve que ces événements soient dus à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pu être évitées malgré les mesures prises. Cependant ce Règlement demeure lacunaire concernant le délai de prescription d’une telle action.

Les passagers ont désormais plus de temps devant eux pour introduire leur action, puisque la première Chambre civile de la Cour de cassation a tranché définitivement cette question dans un arrêt du 17 mai 2017 en faveur d’un délai de cinq ans par opposition à celui de deux ans.

Un couple avait réservé des billets d’avion pour Paris auprès de la compagnie Air France. Cependant, leur vol, prévu le 11 août 2011 en provenance de La Havane, est arrivé avec quatorze heures de retard. Le juge de proximité d’Aulnay-Sous-Bois a donc été saisi le 17 octobre 2013 d’une demande d’indemnisation sur le fondement de l’article 7 du Règlement (CE) n° 261/2004.

Par un jugement du 12 novembre 2015, le juge de proximité a accueilli favorablement l’argumentation de la société Air France qui opposait la prescription de l’action. Pour cela le jugement retient que les normes internationales issues de la Convention de Varsovie ainsi que les règles nationales du Code des transports prévoient un délai d’action de deux ans.

Cependant la première chambre civile de la Cour de cassation a censuré cette décision par un arrêt du 17 mai 2015 en indiquant que « l’action en paiement de l’indemnité forfaitaire était soumise à  la prescription quinquennale de droit commun prévue à l’article 2224 du Code civil ».

Cette solution logique ressort d’une argumentation en deux temps.

  • Premièrement, en l’absence de disposition communautaire, le délai de prescription en matière de transport aérien de passagers doit être déterminé par le droit national de chaque Etat membre ;
  • Deuxièmement, le délai biennal applicable en matière international ne s’impose pas aux demandes d’indemnisation forfaitaire qui relèvent du Règlement CE précité.

La Cour de cassation fait d’abord référence à l’arrêt Cuadrench Moré de la CJUE du 22 novembre 2012. Elle affirme que le délai d’action pour obtenir le versement de l’indemnité forfaitaire prévue aux articles 5 et 7 du Règlement (CE) n°261/2004 est fixé par les règles internes de chaque Etats membres, le Règlement ne prévoyant aucune disposition à ce sujet.

Elle en déduit ensuite que le délai biennal prévu aux articles 29 de la Convention de Varsovie et 35 de la Convention de Montréal ne peut s’appliquer en l’espèce puisque ces conventions portent sur les demandes d’indemnisation supplémentaire liées à un préjudice particulier et non sur les demandes d’indemnisation forfaitaire. Par ailleurs, les dispositions du Code des transports, prévoyant également un délai de deux ans, constituent la transposition en droit français des Conventions de Varsovie et de Montréal. Elles ne sauraient donc s’appliquer à un litige de droit du transport aérien soumis au Règlement (CE) n°261/2004.

La demande d’indemnisation forfaitaire de passager se trouvant par conséquent hors champ des dispositions précitées, il est logiquement fait application du délai de prescription quinquennal de droit commun prévu à l’article 2224 du Code civil.

Désormais, il apparaît clairement une distinction entre les actions visant à des demandes individualisées sur le fondement de la Convention de Montréal ou de Varsovie relevant du délai biennal et celles en vue d’obtenir le versement de l’indemnité forfaitaire prévue par le Règlement précité qui seront prescrites au terme de cinq ans.

Master spécialisé sur les drones : une formation inédite dans l’Union Européenne signée ENAC !

L’Ecole National d’Aviation Civil (ENAC) va inaugurer à la rentrée 2017/2018 le tout premier master français, mais aussi européen proposant une formation complète sur l’exploitation et l’application des drones civils en France, mais aussi dans un cadre international. Ce diplôme unique intitulé « Unmanned Aircraft Systems Services and Management » a pour vocation de former des spécialistes sur les nouveaux enjeux économiques, technologiques, sociétaux ou encore juridiques liés à la présence croissante des drones dans notre société.

Si à l’origine les drones avaient un usage exclusivement militaire, leurs évolutions technologiques permettent désormais à des particuliers avides de divertissement mais aussi à des professionnels et commerçants de les manipuler.

À titre d’exemple Amazon commence d’ores et déjà à réfléchir sur un système de livraison par drones en France. Uber souhaite quant à elle développer, aux États-Unis, un système de transport de personnes par le biais de cette technologie. Ces projets peuvent sembler futuristes mais reposent sur un engouement réel.

Proposant des enseignements divers (management, business, ingénierie,…) correspondant aux besoins croissants des quelques 3000 exploitants français, l’ENAC a souhaité adopter son offre de formations à ce nouveau domaine. Ainsi, les jeunes néophytes pourront intégrer rapidement le monde du travail dans par le biais de professions telles qu’ingénieurs, chefs de projet ou encore responsables de réglementation.

Il s’agit d’une formation unique dans l’Union Européenne, avec de grands partenaires tels qu’Airbus, Safran, ou Thalès qui ouvre de larges perspectives.

Amateurs de drones ou d’aviation civile, à vos candidatures !

 

Les débris spatiaux, une pollution de plus à règlementer

Selon le Dr. Heiner Klinkrad (spécialiste des débris spatiaux au Centre des Opérations de l’ESA, il est commun que les satellites gravitant sur une orbite proche de la Terre soient dans l’obligation de stocker plus de carburant que prévu initialement pour les seules manœuvres visant à esquiver les fâcheuses rencontres au cours de leur durée de vie opérationnelle.

L’heure est grave, les débris spatiaux (orbitaux) constituent une réelle menace à la liberté d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, c’est pour cela qu’il faut que la notion de développement durable s’applique non seulement sur Terre mais également dans l’espace.

La législation actuelle est-elle adéquate ?

Le droit international, les agences spatiales et les Etats eux-mêmes ont légiféré sur le sujet.

  • Concernant le droit international, le Traité des Nations Unies relatifs à l’espace extra-atmosphérique ratifié en 1967, se place comme une référence juridique spatiale. Ce Traité a été suivi en 1972 d’une Convention (aujourd’hui ratifiée par plus de 100 pays) sur la responsabilité internationale pour les dommages causés par des objets spatiaux (incluant les débris spatiaux) et qui prévoit à son article 2 qu’« Un État de lancement (qui y procède) a la responsabilité absolue de verser réparation pour le dommage causé par son objet spatial à la surface de la Terre ou aux aéronefs en vol ». En effet, deux systèmes de responsabilités ont été définis, celui de la responsabilité absolue sans faute pour les dommages causés sur terre ou dans l’atmosphère et celui de la responsabilité pour faute pour les dommages causé dans l’espace extra-atmosphérique. Toutefois la notion de faute n’est pas précisée. Cette Convention reste donc insuffisante en tant qu’outil juridique de la réglementation des débris spatiaux.
  • Par la suite, il a été nécessaire d’arriver à un consensus entre les agences spatiales du monde entier pour qu’elles suivent la même règlementation dans un contexte de concurrence économique. En 1993, a vu le jour l’IADC (Inter Agency Space Debris Coordination Committee), un comité internationale regroupant 13 agences spatiales dont le CNES (français) et la NASA (américaine). La finalité de ce comité a été d’établir un recueil de principes de base à respecter par les agences et d’encourager l’échange de données entre les membres ou la supervision d’études techniques sur les débris spatiaux. Plusieurs lignes directrices ont été consacrées comme limiter les risques de désintégration au cours des phases opérationnelles ou même éviter la destruction intentionnelle et les autres activités dommageables, mais ces règles n’ont pas de caractère contraignant au niveau international.

Une autre forme de règlementation est apparue grâce à l’Organisation internationale de normalisation (ISO), avec des normes majeures telles que l’« ISO 24113 » ayant pour ambition de garantir que la conception, l’exploitation et l’élimination des engins spatiaux et des étages des lanceurs qui servent à leur mise en orbite (et sont éjectés après propulsion) n’engendrent pas de débris pendent leur durée de vie en orbite. Ou encore l’« ISO 11227:2012 », qui soumet un mode opératoire d’essai permettant de déterminer les effets d’une collision orbitale avec un débris sur un matériau utilisé sur la surface extérieure du véhicule spatial.

  • Au niveau national, la France, qui possède la première industrie spatiale en Europe, bénéficie d’une législation avancée avec sa loi du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales. L’article 14 permet notamment à la France d’exercer une action nécessaire à l’encontre d’un opérateur qui aurait causé un dommage lorsque 2 conditions sont réunies :

– La responsabilité de la France a été engagée sur le fondement de la Convention de 1972

– La France a réparé le dommage (conformément à l’article 2 de la Convention)

Plus récemment, l’arrêté du 31 mars 2011 a prévu une réglementation contraignante visant à limiter la production de débris dans le fonctionnement normal des objets spatiaux. Une des solutions est celle de l’envoi des satellites géostationnaires en fin de vie et ne disposant plus de carburant, dans l’orbite cimetière (appelé également l’orbite poubelle) située à 36 000km d’altitude au-dessus de l’orbite géostationnaire afin d’éviter la collision avec d’autres satellites en service et de réduire le risque de production de déchets spatiaux.

Néanmoins, même si la loi française et les autres lois nationales en la matière apportent leur pierre à l’édifice législatif spatial, plusieurs limites se dessinent notamment celle de la non prise en compte de la responsabilité liée aux dommages causés au tiers ou encore le risque de conflits de lois et de juridictions possible en cas de collisions.

Il est donc primordial qu’un texte international contraignant soit adopté afin d’imposer des règles homogènes plus respectueuses relatives à la non-production de débris et à la limitation des risques de collisions.